Cela fait plusieurs jours maintenant que nous nous abritons dans ce chalet, finalement plus sûr que tout ce que nous avons pu trouver jusque là. J'avais beau m'entêter à chercher un endroit plus sûr, il est clair qu'hormis ce chalet, il n'y a absolument rien aux alentours. N'ayant plus un seul véhicule pour nous déplacer, il est beaucoup trop risqué de s'éloigner au delà d'une certaine limite et de traîner trop longtemps dans la nature. D'autant plus, que je fais clairement parti des seuls à savoir me défendre et user correctement d'une arme dans ce groupe. Mon moral est au plus bas, malgré les efforts qu'ont tenté certains pour me rebooster. J'ai beau avoir retrouvé une certaine "motivation", disons que le cœur n'y est pas totalement. Je le fais surtout pour Carl. Qui lui, pourtant si jeune et si inconscient, semble garder un calme et une sérénité à toute épreuve. Surtout, quand il voit que je suis au plus mal. Lui aussi, pourtant, a été terriblement déçu par les agissements de Shane qui fut comme un second père pour lui, quand il me cru mort. Ce dernier, l'ayant également séparé de sa mère... Pour le moment, c'est donc dans ce chalet que nous nous concentrons. Je compte bien souvent sur Glenn et Dimitri pour monter la garde. Bien que l'abri soit correct, nos conditions commencent à devenir de plus en plus difficile. Peu de munitions pour nous défendre et donc trop peu pour entraîner les troupes. La nourriture et l'eau se trouve au jour le jour. Sans Daryl, notre chasseur habituel, on ressent douloureusement la différence sans sa présence.

Comme souvent ces derniers temps, je me suis isolé du groupe pour réfléchir. Pour essayer de ne pas transmettre mon état particulièrement négatif aux autres. Etant eux-mêmes déjà assez souffrant comme cela. Entendant un craquement de branche dans mon dos, je m'empare de mon poignard et me retourne vivement. M'arrêtant net en m'apercevant qu'il s'agit de mon fils, Carl. Aussitôt, je range mon poignard et reprend rapidement le contrôle de mes nerfs, vraiment à vif en ce moment.

- « Salut P'pa. T'avais dis qu'on irait essayer le matériel de pêche... »
- « Ouai... Allons y avant que le soleil ne se couche. »

Comme souvent, la seule présence de mon fils m'aide à reprendre pied. Je me redresse et enchaîne le pas, suivi de très près par Carl. Je n'étais pas très rassuré à l'idée de traîner avec lui au milieu des bois, mais je ne pouvais pas non plus le laisser enfermer H24 dans ce chalet. Et puis, il fallait bien trouver de quoi manger pour tout le monde ce soir. C'est donc paisiblement, que nous traversons à travers bois, jusqu'à atteindre une sorte de ruisseau.

- « Là. Ça devrait faire l'affaire. »

J'observe attentivement la profondeur de l'eau, par précaution, puis tend l'index pour montrer à Carl les quelques poissons nageant juste sous notre nez. Heureusement, ce chalet était composé d'accessoire de chasse et de pêche, ce qui était au moins une bonne chose. Mon visage semblait déjà un peu plus détendu. Ravis, de pouvoir passer un peu de temps seul à seul avec mon fils.

- « Surtout regardes bien, je vais te montrer... »
- « Pas besoin, Shane m'a déjà... »

Aussitôt, Carl s'interrompit en réalisant sa maladresse. Il baissa légèrement la tête, tout comme moi. Un froid pesant s'immisça dans l'atmosphère, tandis que je crispe la mâchoire de colère. Pour autant, j'inspire profondément, puis reprends comme si de rien n'était. Je voyais bien que Carl voulait en parler, mais pour ma pars, je n'en étais pas encore capable... Et il valait mieux pas d'ailleurs. C'est donc tout aussi maladroitement, que Carl tenta de changer de sujet. Tandis que je m'occupe de l'hameçon et de lancer ma première prise.

- « P'pa... Quand est-ce que j'aurai le droit d'avoir une arme ? »
- « Carl, on en a déjà parlé. »
- « Mais je pourrai être utile ! Maintenant qu'on est moins nombreux et après ce qu'il s'est passé... »

Je redresse vivement la tête et fait signe à mon fils de se taire, ayant entendu un bruit derrière nous. Cette fois, une main sur mon colt, je pivote adroitement sur moi-même et balaye les alentours d'un regard minutieux. Ce n'était pas qu'un simple craquement, mais des bruits de pas. Ressemblant même certainement à quelqu'un de vivant. Pourtant, rien dans mon champ de vision.

- « Tiens la ligne, surtout... Ne bouges pas d'ici. »
- « Mais je... »
- « Fais ce que j'te dis ! »

Lui ordonnai-je tout bas, avant de m'avancer à pas de loup sur quelques mètres à peine en direction du bruit, pour ne pas trop m'éloigner de Carl. Ma main toujours plaqué sur mon arme, prêt à la dégainer au moindre soucis.

Un rapide petit coup d’œil par dessus mon épaule et me voici rassuré par la présence de Carl qui n'a toujours pas bougé d'un poil. Mon colt Python toujours braqué sur l'inconnu, je la fixe intensément et avec beaucoup de minutie. Un réflexe professionnel qui a pour but de vérifier si elle semble porter la moindre arme sur elle. A première vue, aucune. Mais cela ne signifie pas qu'elle n'en possède pas, elles ne sont pas toutes facile à voir. Si elle est encore en vie et a réussi à traverser cette forêt, c'est qu'elle doit forcément en avoir une. Quoi qu'il en soit, sa bouille ne me dit rien qui va et dès qu'elle se met à ouvrir la bouche, cela n'arrangea pas les choses. Elle ne semble même pas impressionné par mon arme. Qu'importe, le rôle de cette dernière étant plus de nous protéger que pour frimer. A sa première remarque, j'hausse brièvement les épaules et penche quelque peu ma tête sur le côté.

- « Ça me semble, justement, être une bonne raison pour le faire. »

Mon regard tout autant que mon timbre de voix, reste impassible et froid. Étrangement, son visage me disait vaguement quelque chose... Comme une grosse impression de déjà vu. Mais où ? Et quand ? Je fronce davantage le regard à sa dernière remarque, un peu trop prétentieuse et arrogante à mon goût. Surtout pour quelqu'un, qui se trouve être en position de faiblesse. Ce n'est pas le genre de réaction, disons... habituelle. Mon doigt glisse jusqu'à la détente. Carl n'a toujours pas bougé, mais semble être particulièrement attentif à cet échange. Le regard que l'inconnue porte envers lui ne me plait pas. Raison pour laquelle, j'attire rapidement toute son attention sur moi.

- « Vous êtes qui ? Qu'est-ce que vous voulez ? »

Ne prêtant absolument aucun intérêt à sa précédente question, je me doute qu'elle doit traîner autour de nous depuis bien quelques minutes. Elle espérait donc forcément obtenir quelque chose. Auquel cas, elle aurait simplement passé son chemin ou bien se comporterait autrement. Mais j'ai comme un mauvais pressentiment... Mon instinct de flic revenant au galop et qui ne m'a jamais trompé durant toute ma carrière. Raison pour laquelle, j'allais d'abord devoir lui faire comprendre qu'elle n'avait pas affaire à n'importe qui.

- « Déposez toutes vos armes au sol et on pourra discuter tranquillement. Vous devez bien en avoir quelques unes... »

Mon timbre de voix se veut quelque peu sarcastique. Elle n'avait pas intérêt à me prendre pour un lapin de six semaines. Mes mains ne tremblent pas et je me tiens prêt à tirer entre ses deux yeux, au moindre faux pas.